Interview

avec Robert l'Expert

Robert den Expert - cash for gold interview

Faire des affaires en rendant les gens heureux, telle est la principale caractéristique du métier passionnant de Rob van Beurden, plus connu à Anvers sous son nom publicitaire "Robert l'Expert". Vous pouvez contacter Robert l'Expert si vous souhaitez connaître la valeur de ces bijoux qui sont dans votre placard depuis des années. Van Beurden fournit une estimation gratuite et achète également les pièces si vous le souhaitez. Dans un secteur qui n'excelle pas dans la transparence, Robert l'Expert brille dans la fiabilité. Il croit en la survie en tant que commerçant en faisant des affaires honnêtes. Cela produit souvent des moments émouvants lorsque les clients entendent ce que valent encore ces vieux colliers, bagues et broches. Leur bonheur est incalculable. 

Robert : Le fait que je veuille effectuer des évaluations gratuites a en fait commencé avec l’expérience qu'une vieille amie de ma mère de 80 ans a eue en essayant de vendre ses bijoux. Elle s'est sentie trompée. Je suis ensuite allé faire un tour, l'ai testé moi-même et il s'est avéré que l'achat de bijoux anciens est en fait en grande partie entre les mains d'un groupe d'acheteurs avec lesquels vous vous sentez déjà mal à l'aise en entrant dans leurs magasins. J'ai aussi découvert que les personnes âgées en particulier n'ont aucune idée de ce qu'est un gramme, ni de ce qu'il vaut. Ensuite, j'ai commencé par des évaluations gratuites et j'ai lancé "Robert l'expert" à travers la radio et la télévision, les magazines et les panneaux d'affichage. Maintenant, les gens viennent me voir de partout en Europe. Généralement, l'évaluation d'un bijou, si quelqu'un peut l'estimer, coûte entre un demi et un et demi pour cent chez un bijoutier. Nous le faisons gratuitement. Pourquoi? Parce qu'en fin de compte, trois personnes sur quatre vendent chez moi. Mais je suis tout aussi heureux d'aider ceux qui préfèrent simplement partager les bijoux de maman entre les membres de la famille. Ou ceux qui ont besoin de connaître une valeur à des fins d'assurance.

Vous nommez ce que beaucoup soupçonnent déjà : le secteur a un côté non transparent. Comment vous distinguez-vous de cela ? Comment savoir si vous êtes fiable ?

Robert : Tout d'abord, je suis consultant, et souvent intermédiaire lorsque les familles ont des problèmes de succession. Et parce que je suis consultant, ça crée déjà un certain lien. En même temps, je profite aussi lorsque les gens vendent chez moi. Mais je dirai avec la même facilité, "ne me vendez pas ça" quand les objets sont encore contemporains. Transformez cela en quelque chose d'autre, ou transmettez-le. Si vous avez une fille ou une petite-fille, gardez-la. Vous rendrez quelqu'un heureux plus tard. Je n'achèterai pas tout à la valeur de rebut non plus. Je dirai si nécessaire, que quelque chose a encore une valeur de seconde main. Cela signifie qu'en plus du poids des pierres et de l'or, une pièce peut encore rapporter quelque chose lors d'une vente aux enchères. Je veux aussi aider les gens avec cette vente.

Vous vous présentez comme un intermédiaire, une sorte de notaire dans le secteur du diamant et des pierres précieuses. Formel et correct. Cela signifie que vous devrez parfois décevoir les gens, lorsque la valeur réelle d'une pièce ne correspond pas à la valeur émotionnelle ou aux attentes que les gens ont.

Robert : Il arrive que des gens aient acheté quelque chose de cher, qui finalement ne vaut pas tant que ça. Par exemple, quelque chose acheté pour 100 que j'évalue à 25 - 30. J'ai eu des clients qui ont dit avec colère "Je pensais que nous étions dans le bureau d'un expert" et qui ont tout emballé et sont partis. Ils ne voulaient pas comprendre qu'ils avaient trop payé pour un article. Les plus grands drames ont lieu en juillet-août, lorsque les gens partent en vacances dans certains pays méditerranéens et y font des achats impulsifs. Les touristes sont souvent conduits - par l'hôtel, ou par une agence de voyage - vers un palais de marbre où sont logés des bijoutiers. Ces bijoutiers vendent à des prix jusqu'à dix fois la valeur réelle. La plupart des gens qui viennent ici par la suite disent : « Nous le pensions ». La formule dans l'un de ces pays en particulier, c'est que beaucoup de ces vendeurs acceptent 10 % comme acompte et s'attendent à ce que les gens payent le solde lorsqu'ils rentrent chez eux. Bien souvent le mal n'est pas encore fait, heureusement.

D'où vient votre expertise, existe-t-il des formations pour cela ?

Robert : Non. J'ai mes 40 ans d'expérience. Plus un diamantaire est âgé, plus la base de données dans sa tête est grande et plus ses connaissances et son expertise sont importantes. C'est un secteur très inaccessible et opaque. Même de nombreux bijoutiers ont peu d'idées sur ce que vaut exactement quelque chose. Seuls 1 500 diamantaires dans le monde peuvent reconnaître une pierre, l’ évaluer et lui attribuer un prix. Cela ne représente que 1 500 personnes dans le monde entier. C'est donc une connaissance unique. Mais faute de transparence, les gens sont souvent à la merci des bijoutiers et finissent par préférer aller chez Tiffany sachant pertinemment qu'ils payent 2 à 3 fois le prix. Mais cela leur achète une certaine forme de tranquillité d'esprit. Ce que je fais avec mon expertise, c'est essentiellement ouvrir les portes de cette industrie, en disant : "Eh bien, c'est comme ça que ça marche. Ça c'est la vraie valeur. Je comprends que vous avez payé les coûts de fabrication, le profit du bijoutier et la TVA. Alors vous pouvez déduire ces frais. En matière de montres, toutes les marques A peuvent avoir une valeur ajoutée : Rolex, Cartier (mais pas toutes), Vacheron-Constantin, Jaeger Le Coultre, Patek Philippe, ... Mais les marques B : les Omegas et j'en passe, presque tous ont une valeur de rebut, bien que ces montres ont coûté beaucoup d'argent. Et c'est comme ça que je l'explique à presque tous les clients. C'est très clair et compréhensible pour la plupart des gens. Mais parfois, il y a aussi une valeur émotionnelle à une pièce et ils veulent juste la connaitre. Ou ils viennent chez nous, par exemple, quand ils ont 2 filles et qu'ils veulent déjà donner "avec une main chaude", comme on dit, au lieu de plus tard "avec une main froide". Les gens veulent déjà une estimation de chaque pièce, afin que tout puisse être distribuée équitablement entre les filles plus tard et pour éviter les litiges. Ou il est déjà encaissé parce que, par exemple, la mère ou la grand-mère sait que les enfants ne le porteront pas de toute façon. Et c'est pourquoi ils préfèrent l'encaisser et donner l'argent aux enfants.

N'y a-t-il aucun risque à déterminer une valeur maintenant pour plus tard ? Le marché évolue, peut-être que la situation sera différente dans 10 ans ?

Robert : Comparativement, cela évoluera à peu près de la même façon. Si je fais deux tas, alors ces deux tas auront probablement la même valeur dans 10 ans. Évolué peut-être, mais relativement le même.

Je peux m’imaginer que vous obtenez également beaucoup d'histoires de cette façon.

Robert : Absolument. N'oubliez pas que lorsque les gens vont dans une bijouterie, ils le font parce qu'ils font confiance à ce bijoutier. Il y a quelque temps, il y a eu un sondage aux États-Unis sur la fiabilité des professions. Et tout en bas de cette liste se trouvaient les bijoutiers. Juste au-dessus des avocats 😊 Ils étaient considérés comme les moins fiables. Donc, si un lien de confiance se crée, pour quelque raison que ce soit, alors les registres s'ouvrent complètement. Les clients racontent tout : ce qu'ils ont, comment ils l'ont obtenu... Vous pouvez comparer cela à une visite chez le médecin. Si vous faites confiance à votre docteur et que celui-ci vous dit : « C'est votre rein », alors oui, vous croyez que c'est le cas.

Existe-t-il une sorte d'organisation de contrôle pour séparer les bons des mauvais dans le secteur ? 

Robert : La chose la plus tangible à ce sujet, c'est que je suis membre de la bourse. Alors vous faites partie de ces 1 500 experts. Vous faites partie d'une fédération. Comme je ne suis pas entré dans cette industrie de père en fils, il m'a fallu 13 ans avant d'être autorisé à mettre pied à la bourse. 

Si ‘Bijoutier Jones’ fait une faute professionnelle, ce sera dur pour lui. Mais si moi, en tant que membre de la Bourse du diamant, je fais quelque chose de mal, alors je ferai faillite de Dubaï à New York, et de Johannesburg à Anvers, et cela dans les 24 heures. L'adhésion à l'une des bourses mondiales du diamant est un privilège très important. Mais même dans ce cas, tout se résume finalement au sentiment qu'un client a envers vous. C'est comme avec mon médecin : cet homme m'a l'air professionnel, donc je sais que je peux lui faire confiance.

Dois-je voir cette Bourse comme une sorte de syndicat ?

Robert : Cette adhésion est une reconnaissance que vous êtes un négociant en diamants et que vous avez tout ce qu'il faut pour y travailler. Non seulement au point de vue technique, mais aussi financièrement. Vous devez être solvable. Et vous ne devez jamais avoir mal agi. Vous devez avoir un parcours irréprochable, professionnellement, mais aussi au-delà. Surtout avec ce qui s'est passé, par exemple, en ce qui concerne les "conflict diamonds", ou les "blood diamonds". Nous sommes scrutés par le gouvernement et même par les Nations Unies avec qui nous avons une Charte. Donc, nous, ces 1 500 commerçants, devons vraiment travailler conformément à tous les accords que l'ONU a conclus.

Alors vous avez fait beaucoup d’efforts pour persévérer en tant que commerçant correct dans un secteur à mauvaise réputation. D’où vient la satisfaction ?

Robert : Ma plus grande passion est de transmettre mes connaissances. Au lycée, ils disaient : « Ce garçon devrait être enseignant ». Je n'ai jamais vraiment eu beaucoup de plaisir à vendre des diamants.

Je soutiens une école pour enfants handicapés en Inde. Avec un diamant de $1000 on peut aidé un enfant avec des médicaments, une éducation et des soins pendant 4 ans. Donc, la seule fonction que le diamant a est une fonction émotionnelle, pour laquelle les gens paient des milliers d'euros. Je trouve cela encore toujours incompréhensible, mais cela paie les factures. La passion vient du transfert de connaissances. En fait, je conjugue ma passion avec le commerce. Parce qu'en fin de compte, la plupart des gens vendent. Et moi je peux alors revendre avec du bénéfice. Tout le monde y gagne.

Vous soutenez cette école en Inde. Donc, de chaque pièce vendue ici...

Robert : De chaque pièce achetée ou vendue ici, une partie va là-bas.

Parlons des pièces que vous achetez. Qui vient vendre chez vous ?

Robert : Savez-vous qui vient vendre chez moi ? Les gens simples. Des gens qui ont collectionné des bijoux au fil des années, de leur mère, de leur grand-mère, d'eux-mêmes, etc. Ces gens ne sont pas insensibles à ce qu'ils lisent dans les journaux sur le prix de l'or. Les enfants n'en veulent pas et ils veulent le monétiser. Souvent pour l’offrir, mais aussi très souvent pour payer les factures. Récemment, j'ai eu un couple de personnes âgées içi. J'ai joué un jeu avec eux. Ce qu'ils avaient emmené tenait dans le creux de la main. J'écris le montant sur un bout de papier et je leur demande : "Combien pensez-vous" sachant très bien qu'ils n'en avaient aucune idée. Ils ont dit : "250, 275 euros ?" J'ai dit : "C'est 4 650 euros." La dame s'est mise à pleurer. Ces gens avaient l'air très dignes, mais devinez quoi ? La machine à laver était en panne depuis quatre mois et ils n'avaient pas les moyens d'en acheter une nouvelle. Ils sont donc immédiatement partis au magasin.

Un autre exemple, une famille est venue de Madrid parce que grand-mère avait laissé une pierre de 7 ou 8 carats à ses 6 enfants. Et dans la perception de ces enfants, cette pierre devait valoir un million d'euros. Mais personne ne se faisait confiance. Ils étaient donc tous venus ici en avion. Je n'ai même pas eu besoin de ma loupe. Alors j'ai dit : ce n'est pas un vrai diamant. Et tout le monde s'est regardé : qui a eu cette pierre en dernier et l'a peut-être changée pour une fausse ? Ensuite j'ai regardé à nouveau avec ma loupe et j'ai vu que la pierre n'avait jamais été sortie de sa bague. Je l'aurait vu . Cette pierre n'a jamais été un vrai diamant. Ils pouvaient donc retourner à Madrid les mains vides. Ce genre d’histoire arrive aussi.

Mais cela peut aussi être l'inverse. Parfois les clients pensent qu'une montre ou une pierre ne vaut rien et qu'elle s'avère alors valoir 1 000 euros. Je ne pense pas qu'il se passe une semaine sans que deux ou trois personnes quittent l'immeuble avec des larmes aux yeux. Et puis vous ressentez aussi leur besoin. Car il ne s'agit pas de sommes de 10 000 euros, mais d'environ 1 000 ou 2 000 euros. Alors vous sentez que beaucoup de ces personnes ont besoin de cet argent. Pour eux, c'est comme s'ils avaient gagné au Loto. Et cela crée une énorme satisfaction dans mon travail. 

D'un autre côté, le fait que les personnes de plus de 70 ans, en particulier, n'ont aucune idée de ce que vaut quelque chose me stupéfie. De nos jours vous pouvez déjà en apprendre beaucoup sur Internet, mais la plupart des personnes de plus de 70 ans ne savent pas comment faire de recherches sur le net. Et c'est à cause de ça qu’il y a pas mal d'abus. 

Dans notre industrie on sait rapidement si on a 1 000 ou 3 000 euros entre les mains. L'une des astuces de ces acheteurs est de demander d'abord aux gens : " Que pensez-vous ? Ou de dire : " Je pense qu'il y en a pour 500 euros . Selon la réponse du client, seulement 700 ou 800 euros seront finalement payés, alors que ce qu'il a en mains peut valoir 5 000 euros. Ça arrive tous les jours. Et c'est de l’arnaque.

Le profil d'un client moyen est quelqu'un qui arrive avec un médaillon, ou une médaille Saint Christophe ou une autre pièce en or dans un pendentif, ou une vieille montre dont le cadran est trop petit pour bien voir l'heure et qui pèse +/-50 grammes. Mais là, les chiffres s'additionnent. Regardez (sort un sac avec des bagues, des chaînes, un médaillon avec un signe du zodiaque) c'est l'achat de cette semaine. Vous pouvez voir par vous-même : tout est ancien . 90 pour cent est à fondre. Mais c'est de l'or, que j’ai testé. Le tout pèse environ 350 grammes. En fin de compte il y en a pour 12-13.000 euros de « pacotille ». Il arrive souvent que les gens nous proposent des bijoux comme ça et sont choqués par ce que ça rapporte. La semaine dernière une dame est venue avec sa fille. Nous avons dû la soutenir car nous pensions qu'elle allait faire une crise cardiaque. Même les dents en or valent quelque chose. Un homme est venu ici et il avait gardé les molaires de toute sa famille, de ses ancêtres, et il a quand même touché 300 ou 400 euros.

J'explique aux gens l'évolution du prix de l'or. Pourquoi maintenant est un bon moment ou pas pour vendre. Bien sûr, je n'ai pas non plus de boule de cristal. Mais je peux me baser sur des résultats antérieurs. Je rends aussi visite aux gens à domicile. C'est ce que nous appelons "Robert's Day Out". Une fois, j'ai rendu visite à une dame... elle pesait 150-160 kilos. Elle ne pouvait plus bouger. Et elle me dit : "Mon pote, dans ce placard, dans ce sucrier, prends ce qu'il y a dedans. C'était une pile énorme de différentes pièces d'or : de l'or sud-américain, de l'or faux, de l'or véritable,... je lui dis : « Je n'arrive pas à tout évaluer sur place, pas avec le matériel que j'ai sur moi. » Et elle me répond : « Mon ami, emporte-le. » Moi : « Vous êtes sûr ? » Elle : "Oui, prends-le." Le même jour je lui ai viré 4 600 euros. Elle pensait que ce serait entre 300 et 400 €.

Je suis aussi allé une fois dans une petite maison juste en dehors d'Anvers. Il y avait une dame seule, effrayée. Elle n'osait pas sortir avec ses bijoux. Sur la table il y avait trois bagues. Et franchement, je n'étais pas vraiment content. J'avais été coincé dans les embouteillages, c'était vendredi après-midi et j'allais gagner 15 euros. Je l'ai taquinée en disant : « Vous êtes courageuse de m'inviter ici, car après tout vous ne m'avez jamais rencontré. Mais elle me faisait confiance, car j'étais de « Radio Minerva ». Elle avait entendu ma publicité. Et en fin de compte chaque tiroir cachait quelque chosez et j'ai acheté pour 7 000 euros. Mais elle a d’abord voulu me tester. Je me sens privilégié de pouvoir rendre les gens heureux. Ce sentiment est indescriptible.

Vous achetez et vous vendez. Et après ?

Robert : La majeure partie de l’or que j’achète à un prix qui change tous les jours va à une fonderie. Quand j'ai un kilo, je le vends. Le gain est environ un euro par gramme. 

Cela semble peu. Mais sur un kilo, ça fait 1 000 euros. Et les pièces sont généralement achetées pour la moitié de leur valeur. Donc la plupart des gens qui viennent ici font du bénéfice. S'ils ont une pièce comme une broche, qui impliquait initialement beaucoup de travail, il gagne moins . À moins que cette pièce ne soit si exceptionnellement belle ou date de la période Art Déco, par exemple, alors elle a une valeur supplémentaire lors d'une vente aux enchères.

Si vous achetez de vos clients, où ces bijoux vont-ils ? Avez-vous des endroits fixes pour revendre ?

Robert : 90 % n'ont qu'une valeur de rebut. Seul les bijoux entre 1910 et 1930, la période Art Déco, ont une valeur ajoutée. Ou des pièces signées par exemple Cartier ou Van Cleef & Arpels. Et Rolex ? Une Rolex achetée aujourd'hui sera revendue le même jour.